Ça vous est déjà arrivé à vous aussi ?
Lors d’échanges professionnels, il m’est souvent arrivé (et il m’arrive encore) que l’on me pose la question ou que l’on me fasse la remarque suivante : « au fond, toi, tu es plutôt théorique ou plutôt pratique ? ».
Avec bien sûr le sous-entendu dépréciatif que la théorie n’apporterait rien à l’action… et comme s’il y avait forcément une opposition irréconciliable entre les deux.
On peut comprendre, assurément, que de nombreuses notions théoriques n’apportent pas grand-chose d’utile à la vie en entreprise de tous les jours.
Ainsi, la théorie de Schumpeter sur la destruction créatrice n’apporte guère d’éclairage à l’action du manager face à ses défis quotidiens… quand bien même il s’agit pour lui d’innover ou de s’adapter aux impacts des innovations sur ses équipes !
Mais reprenons la question, qui a une vraie pertinence, lorsque l’on distingue bien ce pour quoi la théorie a été cristallisée et son champ d’application.
En pratique, l’usage pertinent d’apports théoriques
Une théorie a souvent été formalisée pour (mieux) décrire un modèle logique, un enchaînement causal quelconque… ou tout simplement un aspect de la réalité auquel on attache de l’importance, et aussi souvent pour le retenir aisément en le simplifiant.
Son objet ou son champ d’application, c’est facile à comprendre et, pour le coup, à utiliser en pratique ; cela consiste à (se) poser la question : « de quoi l’on parle ? de quoi il s’agit ? » … pour savoir si l’approche théorique est d’une certaine utilité ou s’il s’agit d’un autre aspect des choses qui est en jeu dans l’action.
Alors oui, une approche théorique peut être très fructueuse… à condition de faire ce discernement rapide. Très fructueuse, car l’on sait alors que l’on agit consciemment sur certains leviers pour produire un effet voulu.
… ce qui n’empêche en rien par ailleurs, une fois l’action terminée, de prendre un temps de recul pour identifier ce qui nous a fait réussir (ou pas complètement) … et fabriquer ainsi de nouveaux critères de discernement pour d’autres défis à venir.
Une vision de la personne au travail et de la façon dont elle mobilise ses 2 grandes facultés
Un exemple appliqué de cet aller-retour entre théorie et pratique me fait dire que le leader accompagne mieux l’impact de changements au sein de ses équipes s’il organise non seulement des temps d’appropriation par l’échange autour des enjeux et des principes d’action, puis des démarches d’implication et de co-construction, mais aussi des temps de purge des émotions associées (quelles soient positives ou négatives).
Quels principes sous-tendent ces bonnes pratiques ? Tout simplement une vision (théorique, donc) de la personne au travail et sur la façon dont elle mobilise ses 2 grandes facultés : l’intelligence (notre capacité à comprendre, à discerner) et la volonté (notre capacité à vouloir, à adhérer… ou pas, à aimer … ou détester).
Je ne vais pas vous faire un long développement théorique sur la façon dont les deux facultés humaines coopèrent dans l’activité fabricatrice (philosophie de l’art) et pour se mettre au service d’un bien un bien commun (philosophie politique).
Par contre, à force d’avoir fait ces aller-retours entre théorie et pratique, il y a 2 ou 3 choses que je peux suggérer sur la façon de conduire l’action managériale dans le changement.
Plusieurs repères pour agir efficacement dans le changement
En tant que manager, plus vous prévoyez des occasions d’exercice de l’intelligence pour que chacun puisse comprendre – vraiment – de quoi il s’agit, ce qui est en jeu, les conséquences possibles de l’action des uns et des autres, … et mobiliser son expérience au service du nouveau défi, plus vous avez de chance d’atteindre vos objectifs de changement.
Faire en sorte de mobiliser la volonté, c’est autrement plus délicat et là, bien des leaders sont moins à l’aise. Car il ne s’agit pas seulement d’organiser des moments privilégiés où le manager va poser comme on dit, « la question de confiance » à ses responsables, pour savoir s’ils veulent (justement) le suivre dans cette nouvelle aventure.
Il s’agit surtout, après ce moment d’adhésion forcément individuelle, d’une part d’accepter les représentations potentiellement négatives que chacun se fait des nouvelles perspectives d’action commune (et les faire exprimer va permettre de les réduire) et d’autre part de conduire des actions visant explicitement à créer un plus haut niveau d’énergie collective. Si, si, il s’agit de cette énergie dont le leader va avoir besoin pour dépasser les difficultés… qu’on ne manquera pas de rencontrer au fil de la mise en œuvre du changement.
Il n’est pas exclu que ce que je viens de développer ne « parle » pas vraiment à nombre de leaders et de managers, pourtant en charge de conduire des transformations complexes ou des projets de changements ambitieux.
Une autre façon de le dire est de réfléchir à ce que je fais (en tant que leader ou manager dans le changement) pour renforcer la confiance … et l’agilité dans un moment où justement, ces deux qualités humaines habituellement présentes dans mes équipes viennent subitement à disparaître… au moment même où j’en aurais justement le plus besoin !
Envie d’en savoir davantage ?
Bon, je crois avoir suffisamment « piqué » votre curiosité, en dévoilant (un peu) de théorie sur ces sujets … alors que le point d’intérêt principal du leader ou du manager est la pratique ; ce qui se résume souvent par un « c’est bien beau tout ça, mais comment faire ? ».
Mais mon objectif dans cet article était de vous montrer qu’une vision (théorique) de la personne, confrontée à la réalité des situations d’entreprise, peut permettre d’agir plus en profondeur et de façon plus efficace en situation de changement … et de vous donner envie d’en savoir davantage sur comment faire (en pratique) pour agir sur ces leviers durables de création de valeur !
Bref, que cet aller-retour entre la théorie et la pratique est pour moi tellement naturel, que c’est toujours une extrême surprise lorsque l’on me pose cette question.
Et vous, ça vous est déjà arrivé qu’on vous pose cette question ?