Au cours de nos missions auprès des DSI, nous abordons très régulièrement les sujets de stratégie de sourcing ou de make-or-buy, et le scénario de la production en interne, auparavant systématiquement écarté au motif de la focalisation sur la valeur ou le cœur de métier, revient en force !
Même dans le cas d’activités récurrentes de type service continu (run, support, …), de nombreux clients ré-instruisent le cas d’une production interne des services, contre toutes les injonctions de réduction du headcount.
Pourquoi ce retour en grâce de l’internalisation ?
Bien sûr, on pourrait y voir une tendance sociétale rétrograde au Do It Yourself qui pousse les jeunes décroissants à l’économie circulaire et au potager.
Mais il semble que la réalité soit plus opérationnelle et nous avons identifié au moins 4 inducteurs de ce retour de tendance.
La suprématie du temps sur l’argent
Depuis de nombreuses années, les systèmes d’information sont globalement fiables et la question de la continuité de service ou de la qualité se pose peu. Ce que les business attendent très majoritairement de la DSI aujourd’hui, c’est du délai de réaction, d’adaptation pour répondre à leurs enjeux de souplesse et de vitesse d’exécution de leur stratégie.
Tout le monde sait que les DSI coûtent cher, que la technologie peut être complexe, mais
personne ne comprend que la DSI soit lente !
Cette inertie n’est, en tout cas, plus compatible avec les impératifs de time-to-market que se fixent les entreprises.
La DSI ré-examine légitimement sa stratégie de sourcing avec la fluidité et la souplesse pour cibles. Dans ce cas, la solution « interne » est tentante.
La difficulté de l’innovation en écosystème
Toutes les ESN placent l’innovation au cœur de leur proposition de valeur, avec, pour conséquence une promesse de faire grandir leur client.
Qu’en est-il vraiment une fois le contrat signé ?
L’expérience montre que la collaboration s’installe le plus souvent dans un quotidien monotone qui vide la relation.
Ainsi s’éloignent les rêves d’écosystèmes riches des différences de chacun et bouillonnants d’idées.
Les torts sont généralement partagés entre un prestataire qui trouve une équation service / rentabilité confortable et un client qui peine à se remettre en cause.
Là encore, la DSI pourrait envisager une équipe interne qui « a envie » d’améliorer vraiment la vie de ses collègues, quitte à solliciter ponctuellement des experts pour faire naitre ou fertiliser ses idées.
La manoeuvrabilité des contrats
Dans leur quête de la couverture du risque, ESN et clients ont bardé leurs contrats de clauses de protections qui rigidifient très sérieusement les capacités d’action de part et d’autre.
Il en résulte des opérations pluri-annuelles figées dès le début avec des objectifs de réduction de coût fixés à l’avance et limité à quelques %, qui ne représentent que l’amélioration continue (et généralement surfacique) de la prestation.
Dans ces conditions, il paraît illusoire de challenger en profondeur un fonctionnement et de saisir des opportunités en rupture, encore moins au rythme effréné du business des entreprises.
L’appartenance
C’est là le facteur le plus humain des quatre : à l’heure où le multicanal et l’appétence technologique oriente l’utilisateur vers un échange numérique avec son centre de service (portail, bot, …), la part d’interaction humaine se réduit et l’exigence relationnelle augmente
N’avez-vous jamais eu l’impression étrange que le bot était plus sympa que la personne qui prend votre appel ?
Les DSI ont souvent l’impression qu’ils ont tout essayé en matière de sous-traitance et que le meilleur prestataire ne saura s’approprier la culture et les valeurs de l’entreprise pour offrir une relation fluide et cohérente.
Là encore, la tentation de travailler « en famille » pourrait faire sens.
Est-ce moderne ?
Au cours des dernières décennies, l’externalisation a été une réponse à la difficulté des entreprises de construire et entretenir des compétences à la marge de leur cœur de métier. Elle répondait également à la tyrannie de la baisse du headcount sensée concentrer la valeur sur les sachants du cœur de métier.
Aujourd’hui, la technologie, le digital font partie de l’offre de valeur de l’entreprise qui, d’ailleurs, devient souvent une tech company.
Le numérique est-il vraiment un métier à part de l’entreprise ? Ne deviendrait-il pas cœur de métier ?
Garantir sa proposition de valeur passerait ainsi par la maîtrise de sa propre technologie.
C’est pourquoi les DSI en prise directe avec leurs client-métier engagent la réflexion sur un make-or-buy qui pourrait avoir plus d’enjeu que la simple rationalisation des coûts et des niveaux de service…
Vu comme ça, c’est perturbant, comment donc aborder l’internalisation ?
Bien évidemment, il ne faut pas sous-estimer les problématiques de recrutement et de gestion des compétences et des carrières possiblement différentes du reste de l’entreprise. La collaboration avec la DRH et la Direction Financière est un préalable nécessaire.
Mais si vous êtes convaincu que la valeur réside dans une « collaboration de collègues » en remplacement de liens contractuels intellectuellement satisfaisants mais « froids », vous pouvez aborder le sujet sous deux angles complémentaires :
- Le premier concerne le management de l’entreprise, et la nouvelle donne du numérique qui bouscule les codes de l’entreprise traditionnelle – et notamment de sa gestion. Vous y aborderez naturellement le positionnement de la DSI et sa contribution directe à la performance,
- Le second est interne à la DSI : il concerne l’énergie qui doit bouillonner en permanence dans DSI pour reposer les problématiques business à la lumière de contextes et de technologies nouvelles. Vous combattrez toute notion de stabilité dont la valeur était de proposer une fiabilité … en échange de temps.
Les entreprises et leurs clients sont prêtes pour l’incertitude et la vitesse.
Et vous ?
#DSI #Management #Outsourcing