L’avènement récent des IA génératives de type ChatGPT a mis un coup de projecteur sur le domaine de l’IA conversationnelle. Si ces IA font des prouesses et monopolisent une grande part de l’attention, les entreprises n’ont pas attendu leur arrivée sur le marché pour s’intéresser au potentiel de l’IA conversationnelle. Je vous propose aujourd’hui de nous concentrer sur les produits d’IA conversationnelle type Amelia ou Watson et en particulier sur les défis liés à leur entraînement.
1. Comprendre le métier en profondeur
Si les modèles d’IA générative de type ChatGPT sont pré-entraînés et directement utilisables au quotidien, ils sont peu performants sur des questions pointues relevant d’éléments spécifiques à une entreprise, en particulier lorsque les questions impliquent de connaître les processus internes de la compagnie.
Dans ce cas, et peu importe la solution d’IA conversationnelle retenue, un entraînement sur mesure sera nécessaire. Celui-ci peut bien entendu s’appuyer sur des outils d’IA générative pour renforcer l’aspect naturel des réponses, par exemple, mais il ne peut en aucun cas être réalisé sans une compréhension intime du métier où s’intègre l’IA.
En d’autres termes : pour entrainer efficacement une IA conversationnelle, la pleine maîtrise des spécificités des activités pour lesquelles elle est conçue est cruciale. Une connaissance approfondie des processus, des tâches et des besoins des utilisateurs permet d’adapter l’IA de manière plus pertinente et de fournir des réponses précises aux requêtes des clients.
Un bon exemple est une question du type « j’ai perdu ma carte bleue, comment en avoir une nouvelle ? ». A cette question, et vous pouvez le tester de ce pas, ChatGPT vous répondra dans les grandes lignes de contacter votre banque pour qu’elle vous en fournisse une nouvelle. Une IA conversationnelle construite et entraînée dans le contexte précis de VotreBanque devrait quant à elle guider l’utilisateur de bout en bout dans le renouvellement de sa carte et déclencher l’envoi d’une nouvelle carte si toutes les conditions sont réunies.
Une IA conversationnelle dédiée à un métier spécifique ne peut pas simplement être une boîte noire ; il est vital de comprendre avec précision les enjeux des clients et la façon dont le métier y répond pour garantir un entraînement de qualité, essentiel pour des réponses pertinentes une fois l’IA en production.
2. Nourrir l’IA de données directement issues du terrain
L’entraînement efficace de l’IA conversationnelle repose sur des données de haute qualité. Il est indispensable de collecter et d’annoter des données pertinentes provenant directement du terrain et des conversations que l’IA devra prendre en charge.
Un exemple valant souvent mieux que de longues phrases, cela revient à identifier pour un jeu de phrases données l’intention de l’utilisateur, ce qu’il souhaite réaliser. On y associera par la suite les processus propres à l’entreprise :
- Je souhaite une nouvelle carte bancaire – RenouvellementCarte
- J’ai perdu ma carte bancaire – RenouvellementCarte
- Ma carte a été refusé au restaurant – ErreurPaiement
- J’ai voulu payer par carte mais ça n’a pas marché – ErreurPaiement
Dans ce cadre, les échanges entre les utilisateurs et les employés constituent une mine d’informations précieuses. C’est en utilisant ces données que l’on obtient les représentations les plus fidèles de la façon dont s’expriment réellement les clients. Cela permettra d’identifier avec un meilleur taux de réussite leurs intentions une fois l’IA entraînée.
Il est possible, et parfois tentant, de partir d’une feuille blanche et d’imaginer quelles sont les demandes fréquentes des utilisateurs et comment elles sont exprimées. Si ce processus peut fonctionner dans un premier temps il présente de mon expérience certains risques majeurs :
- L’IA semblera entrainée et prête à l’emploi mais une fois confrontée au « parler-vrai » des utilisateurs ses stats risquent de s’effondrer. Cela se traduira par une perte importante du niveau de reconnaissance des intentions et donc de la capacité de l’IA à bien répondre aux demandes utilisateurs.
- Les principales demandes qui auront concentré l’énergie au cours du projet ne seront pas forcément les demandes les plus courantes des utilisateurs et certains périmètres importants risquent d’avoir été oubliés ou délaissés au profit d’autres peu usités.
Un bon entrainement, vous l’aurez sans doute compris, se nourrit au maximum des données issues de la réalité du terrain (extract de tickets, enregistrement de conversations…). Il s’appuie aussi, et c’est primordial, sur la connaissance des opérationnels en contact au jour le jour avec les clients.
3. Itérer et organiser l’amélioration continue
L’entraînement d’une IA conversationnelle est un processus itératif. Peu importe la quantité de travail initial, votre modèle devra évoluer dans le temps. C’est un parcours essentiel pour maintenir la pertinence et la précision de l’IA à long terme.
Il est, de fait, important de recueillir les retours des utilisateurs et de les intégrer dans le processus d’entrainement de l’IA. Cela permet d’ajuster les réponses, de répondre à de nouvelles requêtes en ajoutant de nouvelles compétences à l’IA ainsi qu’à anticiper d’éventuelles évolutions métiers.
Sur le court terme une bonne pratique peut être d’ouvrir son IA aux utilisateurs pendant des périodes courtes prédéfinies. Par exemple, pour une IA conversationnelle par téléphone, d’ouvrir son service 1h par jour afin d’utiliser les données ainsi collectées pour améliorer son modèle. Une fois atteint le niveau objectif de reconnaissance et de traitement, l’IA conversationnelle pourra être déployée.
La mise en place de projets d’IA conversationnelle, vous l’aurez compris, peut transformer en profondeur la manière dont les entreprises interagissent avec leurs clients. Pour que cela fonctionne de manière efficace, il est primordial d’associer à ces projets les personnes qui connaissent le mieux les clients finaux, leurs manières de s’exprimer ainsi que leurs attentes.
Que ce soit au sein d’un service client ou d’une direction interne (DRH, DSI, Direction Juridique…) un projet d’IA repose sur une collaboration étroite entre le métier et la technologie.