La (rude) concurrence des fonctions support

Les fonctions support évoluent sur le marché interne de l'entreprise et cet écosystème est aussi difficile - voire plus- que l'océan rouge des business de l'entreprise. Comment identifier les acteurs et les valeurs sur ce marché ? Jean-Luc tente de baliser la réflexion.

Le marketing des fonctions internes est un vaste champ d’exploration qu’on aborde souvent par la dure réalité : le marché.

 

Un marché pour les fonctions support ?

Qui dit marketing dit marché. La vision économique le décrit comme « un lieu de rencontre des vendeurs et des acheteurs de biens et de services où, de la confrontation entre l’offre et de la demande, va naître le prix d’échange ».

On évoque également les acteurs sur ce marché : les clients, les producteurs, les distributeurs, les influenceurs et les régulateurs.

Tout cela est très transposable au marché interne de nos fonctions support où la confrontation entre l’offre et la demande est (souvent durement) éprouvée. On y retrouve également les acteurs :

  • Les clients sont connus mais il faut toutefois faire la différence entre les clients réels – ceux qui payent – et les utilisateurs – ceux qui consomment les services
  • Les producteurs sont assez nombreux. La fonction elle-même est l’un d’entre eux, mais n’oublions pas les éditeurs de solutions Saas, les prestataires de service auprès desquels on externalise tout ou partie de processus et… les clients eux-mêmes qui produisent des solutions « home-made »
  • Les distributeurs ne sont souvent pas clairement identifiés, mais nous parlerons plutôt de canaux de distribution des services qui peuvent être numériques ou plus relationnels
  • Les influenceurs sont nombreux et on les retrouve au sein des sponsors des projets, mais également dans les MOA ou encore auprès des utilisateurs (les agents de proximité, les key users…)
  • Les régulateurs prennent des formes différentes, mais dans des businesses très réglementés, le RGPD, la sécurité, la conformité formattent également les marchés internes.

Voilà, le marché des fonctions internes existe, qu’on le veuille ou non !

Le sujet est maintenant de savoir comment on peut y évoluer.

 

Captif ou pas ?

Il est tentant – et rassurant – de penser que ces marchés sont captifs : nous avons tous entendu un. jour « de toute façon, ils sont obligés de passer par moi ».

La vérité est que l’offre externe est tellement riche, souple et agressive que les clients ont toute liberté d’acheter ou de s’abonner sans en référer à quiconque. Ah bien sûr, le manager de la fonction concernée râlera au moment où ce service sera opérationnel et qu’il faudra demander à la DSI de l’interconnecter avec l’ERP ou le système RH… trop tard.

Sur les fonctions support, par nature un peu à l’écart du cœur de métier de l’entreprise, il est largement toléré – voire encouragé – d’aller chercher à l’extérieur des solutions enrichies de l’expérience d’autres entreprises et secteurs.

Ces concurrents sont redoutables, mais sont-ils seuls ?

 

Des concurrents inattendus

D’autres concurrents, plus indirects, apparaissent, insidieusement ça et là…

Ils ne viennent pas du monde de l’entreprise, ils ne représentent pas une concurrence frontale, mais des modèles d’expérience, numériques, affichant peu de contraintes, à l’utilisation un peu « fun ». Ces concurrents, non seulement proposent des solutions pertinentes, mais les emballent dans un parcours utilisateur si fluide, si simple qu’il ringardise dans l’instant des solutions éprouvées et bien intégrées au SI de l’entreprise. Des exemples ? Les notes de frais, des solutions de partage de ressources, de la collaboration en ligne…

Ces concurrents prennent le meilleur de la user experience des GAFAM et du BtoC en général pour la mettre dans des solutions d’entreprise : ne rêvez-vous pas d’une solution de service IT qui se comporterait comme Amazon ? facilité d’accès, service client…

Ces concurrents secouent – par exemple – les DSI qui ont toutes les peines du monde à expliquer pourquoi les outils d’entreprise sont « moins sympas » que Facebook ou Google ou pourquoi la nouvelle version d’un logiciel est déployée en 12 mois dans l’entreprise alors que Apple déverse des millions d’iOS en quelques heures.

Pour autant, ils doivent être une source d’inspiration pour humer le marché et identifier des solutions modernes et plus « adoptables.

Voilà, la concurrence est rude sur les fonctionnalités et l’expérience utilisateur, mais les fonctions support ont un atout sur leur marché interne, et il est de taille.

 

Jouez à domicile !

Les solutions des concurrents externes sont évidemment riches de fonctionnalités capitalisées dans des contextes variés.

Mais les équipes internes de l’entreprise ont une botte secrète qu’elles exploitent paradoxalement peu : elles partagent la vie de l’entreprise. Elles en ont la culture, la vision transversale, le réseau de relations : elles ont la meilleure compréhension du contexte, des freins, des pièges…

Elles ont donc, objectivement, la meilleure capacité à comprendre les clients et donc à proposer des solutions. Cette posture d’offre sur son marché interne doit lui permettre de maximiser la pertinence – et donc la valeur- de ses solutions face à une concurrence plus « lisse ».

Reste le prix que nous aborderons dans un autre article mais qui ne doit pas comparer des coûts internes à des coûts externes qui ne génèrent pas le même cash-out.

 

Un océan bleu à l’intérieur !

Si on n’y prend pas garde, le marché interne des fonctions support montre un côté océan rouge déferlant à coups de Saas et de BPO.

Mais l’ancrage des fonctions support au cœur de l’entreprise et leur contribution naturelle à la valeur produite doit leur permettre de créer ou renforcer des poches de valeur que la concurrence externe ne peut proposer.

L’océan bleu est devant : agité mais bleu !