Nicolas Hulot : la vaine recherche du top/down

Au-delà des aspects politiques que l’Histoire nous apprendra, le discours de démission de Nicolas Hulot m’interpelle dans son approche très classique du changement. 

L’appel au chef

Tout au long de son discours, il dit ne pas avoir fait assez pour la cause, malgré un certain nombre d’avancées factuelles qu’il cite.

Il remet en cause l’approche par « petits pas » qui ne sont pas à la hauteur pour lui des enjeux à traiter.

Son discours, loin d’être une critique sur l’entièreté des objectifs du gouvernement, ressemble à un « appel au chef »: il remet en cause une absence de stratégie écologique qui serait décrétée par le président de la république et que l’action gouvernementale devrait décliner.

Il explique à travers son argumentation le « risque à ne pas changer » et exhorte à réinventer notre modèle et, selon lui, y consacrer la grande part de l’énergie et des ressources de l’action publique.

Ce faisant, il décrit très clairement une approche stratégique classique impulsée par la direction (Top-down) qui devra servir à convaincre le corps social.

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Une stratégie ne peut résoudre un problème complexe

Nicolas Hulot, à travers sa démission, se trouve comme beaucoup de dirigeants face à un changement complexe, il souhaite le traiter avec des outils inadaptés. Il appelle de ses vœux une approche stratégique classique pour résoudre un problème complexe. La crise écologique planétaire ne se résoudra pas même par une action concertée du gouvernement français. Les modes d’action classiques politiques et gouvernementaux ne permettent pas d’avoir une cible stratégique claire et acceptable par le plus grand nombre sur ce type d’enjeux du fait du trop grands nombres d’incertitudes : hiérarchie, multi-objectifs, réseaux d’influences, géopolitique, incertitude technologique….

Un changement stratégique sans cible ?

Ce qui est à mon sens regrettable, c’est qu’il renonce au principe d’actions concrètes pour chercher la modélisation d’un monde conforme aux enjeux qu’il défend.

Au lieu de continuer à mener des actions (bien qu’imparfaites ou insuffisantes pour lui) qui mises bout-à-bout marquent un changement et peuvent influer, il s’arrête pour vouloir construire un nouveau modèle.

Au lieu d’aller chercher à développer l’intelligence collective (citoyens, experts, associations, réseaux internationaux) pour faire des millions de petits changements qui dessineront le nouvel ordre des choses, il cherche à faire arbitrer par le « système » (le gouvernement français) des orientations qui le dépassent.

Au lieu de continuer à promouvoir les expérimentations innovantes, qui au fil de leur développement, trouveront (ou pas) l’efficacité, il cherche à convaincre sans pour autant être en mesure d’expliquer des solutions complètes et opposables.

De petits pas pour des remises en cause profondes

Contrairement à ce que dit Nicolas Hulot, ce n’est pas la politique des petits pas qui est en cause. Si elle n’obtient pas des ruptures planifiables dans un calendrier électoral, les approches unitaires expérimentales locales et incertaines contribuent tous les jours à changer nos façons de vivre.

En revanche, penser qu’une décision stratégique permettra de planifier un changement pour résoudre les défis écologiques est une erreur d’analyse de la complexité du changement à opérer.