Transformation : « On est bientôt arrivé ? »

Tout le monde parle et fait des transformations dans l’entreprise, la société,… ! Il devient de plus en plus fréquent que ce terme remplace les notions de changement, d’évolution d’organisation et il n’est pas rare que les entreprises mènent plusieurs transformations en parallèle.

« il est très difficile de prévoir les effets de changements aussi profonds »

Si dans l’entreprise, « tout le monde est absolument certain de devoir se lancer », parce qu’on « n’a pas le choix », …peu de personnes se soucient de la fin de ce type de démarche. D’ailleurs, anticiper la fin d’une démarche de transformation c’est déjà prévoir les bénéfices attendus. C’est là que cela se complique, il est très difficile de prévoir les effets de changements aussi profonds et larges que ceux recherchés par une transformation (changement de culture, de business model, de positionnement…). Dans le monde des projets à hautes incertitudes et forts impacts, les théories classiques (Coût, Qualité, délais) flirtent avec leurs limites…

Pour décomposer ce problème et tenter de répondre à la question « Quand est-ce qu’on arrive ? », il est intéressant de questionner les étapes avant l’arrivée et de clarifier 3 points :

Voulons-nous arriver ?

Cette question apparemment stupide dans une logique de projet est pourtant fondamentale pour ce type de démarche. L’enjeu n’est pas forcément d’arriver ou de finir sa transformation mais peut être au contraire de maintenir la dynamique !

J’y vois 2 principales raisons.

« accepter un temps long est un vecteur de sécurisation de la démarche »

La 1ère correspond à l’ampleur de la transformation à mener et du temps nécessaire pour accomplir des changements. Les changements culturels ne se font rarement en quelques mois et accepter un temps long est un vecteur de sécurisation de la démarche.

« un « véhicule de transformation » qui ne va pas plier à la 1ère secousse »

La 2ème correspond à la posture nécessaire pour rester vigilant, pour garder en tête la nécessité de s’adapter. Entrer dans une logique de changement permanent met en avant l’importance de la construction d’un « véhicule de transformation » qui ne va pas plier à la 1ère secousse.

Allons-nous réellement arriver au bout ? 

Si la réponse à cette question est « évidemment oui ! » Il est probable que votre transformation n’en soit pas une. S’il y a pas ou peu de risque, c’est que votre transformation ne porte pas un degré de remise en cause suffisamment important pour changer en profondeur votre entreprise ! Vous êtes probablement plus dans une logique d’adaptation. Les méthodes de projet classique qu’elles soient agiles ou jalonnées doivent vous permettre à coup sûr d’atteindre une quantité satisfaisante de résultats avec un niveau de risque piloté.

De fait une transformation est un plongeon décidé dans l’incertain. Pour ne pas totalement perdre pied, je crois important de faire la distinction entre l’orientation de votre transformation et des matérialités qu’elle va rechercher. Sommes-nous arrivés au bout de l’orientation définie ? Probablement jamais, comme nous ne sommes jamais arrivés au bout de l’excellence opérationnelle, de l’orientation client…
En revanche, vous allez très certainement pouvoir terminer la mise en œuvre de « petits » changements. Vous pourrez alors utiliser la multitude de vos réussites unitaires pour décider que oui : « nous avons fini notre transfo ».

Comment saurons-nous que nous sommes arrivés ?

Nous venons de voir que la fin d’une transformation est principalement une décision et qu’elle porte donc en elle une dose (importante ?) de subjectivité. Comment savoir et reconnaître un point d’arrivée ? Les logiques de mise en œuvre de solution et de déploiement touchent là aussi leurs limites.

« Valider toutes les lignes du plan d’action ne garantit pas le succès »

Mettre en place des process, des outils, avoir refait la peinture des vestiaires ne sont pas des conditions suffisantes à la réussite de votre transfo. En environnement incertain, nous sommes régis par les lois où les liens de causalité ne sont pas directs.
Valider toutes les lignes du plan d’action ne garantit pas le succès !

« Être capable de matérialiser les différences de résultats […] doit vous permettre de savoir si oui ou non vous êtes allés assez loin dans votre transformation »

Le meilleur et le seul indicateur de réussite est la caractérisation des effets des changements opérés. Ils ne se mesurent pas exclusivement par l’EBITDA, mais aussi par la différence de réaction de l’organisation face à des situations historiquement difficiles, l’image projetée de l’organisation, l’autonomie et l’engagement des collaborateurs…
Être capable de matérialiser les différences de résultats ou comportements sur un panel très large de critères doit vous permettre de savoir si oui ou non vous êtes allés assez loin dans votre transformation.

Se lancer dans une logique de transformation d’une organisation n’est pas un acte complètement rationnel. C’est chercher à anticiper et influencer les évolutions de votre environnement (concurrentiel, social,..) dans un espace de prédictibilité faible (adhésion, bénéfices, modalités). Je pense qu’il est nécessaire de construire un « véhicule » solide permettant de soutenir cette ambition et faire face aux péripéties du voyage.

Vous ne verrez pas de pancarte qui vous indique la fin du voyage, mais le paysage derrière le hublot vous permettra de décider si la situation vous convient ou s’il est nécessaire de persévérer dans la transformation.

#Management #Transformation