L’expérience client a été étudiée sous toutes ses coutures et il est démontré que le parcours est un élément clef de cette expérience. En effet, il matérialise notre « voyage » dans un « univers » que nous cherchons à explorer… mais l’entrée n’est pas toujours évidente à trouver.
Cet article prend place dans la continuité d’une série consacrée au marketing des fonctions internes (après le marketing interne lui-même et la concurrence sur le marché interne).
Un parcours BtoB
Le parcours BtoC se résume souvent à une approche fonctionnelle à base de processus : qui fait quoi pour qui quand etc…
Cette approche est appliquée aux magasins et aux sites web. Ce type de parcours « mécanique » est primordial : il modélise des comportements et guide le client pour ne pas « le perdre dans la boutique ».
Contrairement à ces parcours « physiques » qui sont travaillés en cohérence et en fluidité, le parcours BtoB est un parcours de maturité.
Il s’agit de convaincre un écosystème « construit » (critères objectifs…), mais divers (fonctions, influences…) de choisir une solution complexe à une problématique qui ne l’est pas moins.
Ici donc, pas d’achat « coup de cœur » mais une construction de la solution et une compréhension de ses avantages et inconvénients qui demandent du temps et des échanges, en interne chez le « client », mais aussi avec le « fournisseur ».
Le marché des fonctions internes, à l’intérieur de l’entreprise donc, est un marché BtoB (presque) identique : il propose des services complexes dont il est nécessaire d’expliciter la valeur à des « clients internes » polymorphes.
Il y a une différence notable avec un parcours BtoB externe, c’est la dimension politique : « client » et « fournisseur » sont dans la même entreprise, il n’y a donc pas d’étanchéité. Cette proximité peut avoir des effets pervers.
Un premier est que la fin du circuit de décision est commune et que la « DG » peut avoir l’arbitrage.
Un autre est que la solution interne peut être vécue comme une « obligation » et donc une contrainte dont le client serait tenté de se libérer (cf la concurrence sur les marchés internes).
Travailler le parcours du client interne va donc permettre de fluidifier la réflexion, mais également de lever ce qui pourrait être vécu comme des contraintes.
Nous avons, nous, l’habitude de modéliser ce parcours de maturité en 4 phases :
- La découverte
- L’expérience
- La construction
- La production de valeur
Découvrir ensemble
Dans de nombreux cas, le client interne construit sa maturité seul et sollicite la fonction (RH, IT, Innovation…), contraint/forcé, au moment de la construction.
Il arrive alors avec des convictions forgées, des solutions éprouvées (à l’extérieur), un circuit de décision convaincu (DG) et donc, une évidence de solution qui s’impose à tous.
La fonction concernée peut avoir deux postures : la rébellion en tentant de contrer la solution et pousser la sienne, ou la soumission en acceptant cette solution qui s’ajoute à son catalogue.
Le fournisseur interne doit comprendre la logique de cette approche dans l’esprit du client
- L’image de l’interne est toujours plus « terne » que le marketing des solutions de marché
- Ces acteurs du marché ont compris qu’il fallait vendre au client final et non passer par la fonction interne qui a une tendance industrielle au one-size-fits-all,
- À l’extérieur, les clubs de managers et autres réseaux sont des lieux de réflexion et d’échanges riches
Ainsi donc, même si le client est loyal à l’entreprise, en captant ces informations, il se construit des convictions et se forge une vision d’une solution cible inspirée de sa compréhension du marché. Il arrive donc avec une solution claire.
Pour éviter d’être écartées à l’entrée du jeu, les fonctions internes doivent donc prendre ce rôle d’inspirateur ou du moins y participer
- En allant pro-activement à la rencontre de leurs clients pour exposer des visions, des convictions
- En montrant les apports de la technologie à leur métier – par exemple, en allant ensemble à des salons dédiés à ce métier pour rencontrer ensemble les acteurs du marché,
- En analysant les approches des concurrents.
Cette approche a trois avantages
- Elle rassure le client sur la capacité du fournisseur interne à proposer une vision et sur ses convictions
- Elle renforce la relation entre le client et son fournisseur interne
- Elle ouvre la porte à la collaboration et donc à la convergence des intérêts dès le début de la réflexion
Client et fournisseur internes partagent maintenant une vision et des convictions, il s’agit de tester des solutions.
Expérimenter
L’expérimentation des solutions possible est également un terrain de collaboration riche.
Elle démarre par leur identification et sans doute l’établissement d’une liste qui intégrera la pertinence de la solution bien sûr, mais également
- L’acceptabilité de celle par l’entreprise (culture, réglementaire…)
- Son intégration dans l’écosystème de solutions connexes (l’app de gestion des congés est-elle compatible avec mon SIRH…)
- La dimension utilisateur
- La rapidité de mise en œuvre
- Le coût et plus généralement l’énergie de mise en œuvre, côté client et côté fournisseur
Ce travail permet de travailler en commun ces critères et, là encore, de converger vers une solution acceptable par tous.
Viendra ensuite naturellement une phase d’expérimentation d’une ou plusieurs solutions sur un département, un pays pour valider les points évoqués ci-dessus.
La construction est aussi une étape commune
La phase de construction mérite aussi souvent d’être revue : l’irritant le plus classique mentionné par les clients internes est « l’effet tunnel ».
Il s’agit de la période ou le fournisseur qui a « bien compris » retourne sous sa tente pour construire la solution avec ses spécialistes en revenant vers le client chaque mois pour tenter de le rassurer et livre au bout de plusieurs mois le produit demandé et qu’il espère pertinent…
Ce type de production est d’un autre âge et l’époque est à la co-construction. Il ne s’agit pas de placer de la novlangue, mais de faire ensemble au bénéfice de chacun :
- Le client est impliqué dans sa solution, le changement qu’elle induit en sera facilité, et les ajustements pourront être pris en compte à la volée,
- Le fournisseur montre son savoir-faire sur le terrain, sa capacité à animer un écosystème (clients, partenaires…) et sa souplesse dans la réalisation.
Voilà, la solution est prête. C’est la fin du projet ? Au contraire, c’est un début !
Quand est-ce que ça « rapporte » ?
Ces précédentes phases tellement importantes ont permis de construire une solution (et une relation aussi, c’est aussi précieux) mais, si on se place du point de vue du client, elles ont, pour le moment, seulement coûté – en temps, en ressources.
Au risque d’enfoncer une porte ouverte, la valeur d’une solution ne s’exprime que quand elle est mise en œuvre.
C’est pourquoi nous appelons cette phase de retour sur investissement « Production de valeur » (plutôt que « run » ou « delivery » qui évoquent plus l’usine que le produit) et bonne nouvelle, elle dure – heureusement – plus longtemps que les précédentes.
Mais attention, l’« usine » tourne et la valeur est produite, mais le contexte, lui, bouge. Aucun métier n’est stable dans le temps, ses contraintes, ses clients, ses concurrents modifient son terrain de jeu chaque jour.
C’est la raison pour laquelle, dans cette phase, et fort de cette relation forgée en amont, clients et fournisseurs doivent reposer sans cesse la question de l’optimisation de la valeur, de la prise en compte de nouvelles contraintes ou opportunités de la part du métier ou du fournisseur.
Cet ajustement permanente permet d’entretenir la relation dans le sens de la valeur et donc de rester orienter vers les bénéfices pour le client.
C’est un beau voyage
Il est important de noter que le client va, quoi qu’il en soit, effectuer ce parcours de maturité dans son idée / son attente de service.
Malheureusement le risque est grand qu’il le fasse avec son écosystème de pairs, partenaires et qu’il revienne vers son fournisseur interne très en aval de la réflexion avec une solution déjà très construire et un engagement vis-à-vis de ses partenaires qui verrouille la mise en œuvre.
Pour être présent en amont de ce processus de maturation, il faut systématiser une approche client pro-active avec l’intention de l’étonner en lui faisant découvrir et en expérimentant avec lui des outils, des méthodes ou des pratiques qui pourraient lui simplifier la vie ou améliorer son business.
C’est ainsi que les idées se plantent dans la tête des décideurs et qu’elles produisent la valeurs au travers d’une solution interne partagée et pertinente pour tous.
Commencez le voyage, allez au devant de vos clients et commencez par les étonnez !